26 mars 2008

Fanatisme et Surdité

"Le fanatique est un orateur sourd comme un pot"


Cette affirmation de Gibran, extraite du livre d'aphorismes ''Le sable et l'écume'' (Sand and Foam, 1926), prend tout son sens aujourd'hui et correspond plus que jamais au malaise, non, au fléau, à la pandémie qui s'est abattue sur l'humanité.

Le fanatisme a toujours fait ravage, me diriez-vous, oui mais il n'a jamais fait autant de victimes et de dégâts, ni menacé comme une épée de Damoclès de fracasser les têtes des innocents et d'exterminer des tribus, des peuples, des ethnies, des identités, à l'heure même où l'humanité connait son plus haut niveau d'évolution. Au meilleur des cas, comme le soulignent les discours officiels, le fanatisme creuse le fossé entre ce qu'on appelle ''cultures'' et ''civilisations''.

On parle alors sans cesse de dialogue des cultures et des civilisations, c'est très bien... mais quel dialogue voulez-vous établir si les deux (ou plusieurs) protagonistes sont frappés de surdité plus au moins totale. N'est-ce pas au bout du compte un dialogue de total convaincus?

La surdité est, dans ce cas, non pas subie comme une pathologie qui frappe un malheureux sujet indépendamment de sa volonté ; je pense plutôt qu'elle est délibérée, voulue, choisie.... Pourquoi? Parce qu'elle sert les hauts intérêts de certains systèmes totalitaires qui prônent pourtant haut et fort des valeurs qui leurs sont totalement inconnues comme la tolérance, l'ouverture, l'échange et la fraternité.

On le sait déjà, me diriez-vous. Oui mais le drame c'est que ces hauts intérêts, ''dictés'' à forte raison par des enjeux purement économiques, mais également par un obscurantisme religieux DÉGOÛTANT, sont cachés derrière le masque de la guerre contre le terrorisme, la lutte pour l'instauration de la démocratie et le combat pour la paix dans le monde.

‘‘Ça aussi on le sait déjà'' ...., d'accord ! Mais arrêtons-nous un moment pour réfléchir et constater où en est arrivée la situation. Les deux tiers de l'humanité (si ce n'est plus) souffrent, agonisent. Leur bourreau? Le tiers restant. L'équilibre des forces n'étant pas établi, il était évident que les plus puissants imposent leurs lois, et avec la manière svp !!!

Hout yakel hout w klil ejjehd ymout, me dira-t-on, c'est la loi de la nature!!
Certainement, puisque l'homme est un animal social. Seulement l'animal dominant (dans notre cas le poisson) n'a jamais prétendu, moyennant grands discours et belles formules, agir au nom de la démocratie, de la sécurité, ou de la paix ; il est clairement établi que c'est une question de suprématie, de voracité, de survie !! (Au fait, les poissons ne sont-ils pas sourds?! :) )

Morts par milliers, enfants déchiquetés, familles explosées, victimes impuissantes torturées à mort devant leurs parents et leur enfants, femmes violées, honneurs bafoués, dignités écrasées, maisons démolies, terres brûlées, existences anéanties, espoirs envolés !!!!!!! L'homme ne s'est-il donc jamais distingué de l'état animal? Tel est le beau résultat du discours des sourds, et à quel prix ?!

Alors cessez de légitimer au nom des plus nobles valeurs, moyennant grands discours et belles supercheries, les horribles massacres et les actes immondes perpétrés aux quatre coins du monde.

Arrêtez ces plans machiavéliques et ces pommes de la discorde offertes en cadeaux empoisonnés aux pauvres peuples démunis, pour leur extraire le sang des veines et la sève de la vie.

Arrêtez de saccager les Nations et d'humilier les peuples au nom de la liberté.

Stoppez la zizanie semée entre frères de sang, qui tombent malheureusement, et macabrement, dans le piège; Éteignez Nar El Fetna (je l'emprunte à Bouchnak dans l'excellent Dhamir Arabi) , dont le seul but est de diviser pour mieux régner.

Arrêtez de mener une guerre obscure contre une religion qui prône la paix.

Arrêtez d'assombrir l'image de fidèles et de simples croyants aux yeux de présomptueux ignorants.

Entendez-vous tous ces appels ou faites-vous semblant d'être sourds?

J'ai dit plus haut que la surdité était plus au moins totale ; je m'explique: Les donneurs de leçons, qui veulent apprendre au reste du monde (et à des pays dont les civilisations sont vieilles de milliers d'années) comment il faut vivre, élever ses enfants, traiter sa femme, pratiquer sa religion et même manger et se laver, sont les plus sourds.

Cette surdité totale (et je crains délibérément incurable) a donné lieu à un monologue où le sourd impose par la force (3tah rabbi sahha lih) un modèle de démocratie absurde qui se trouve être à mille lieux de l'idéal imaginé par les grecs anciens.

Le moins sourd, qui subit ici l'acharnement aveugle du sourd total, cherche désespérément à faire entendre sa voix, à s'expliquer, à faire comprendre son point de vue. L'ironie du sort c'est que le sauveur massacre le sauvé qui a cherché en vain à être écouté.

Le clan des moins sourds cherche à resserrer ses troupes et à se mobiliser pour se défendre, mais des brebis (l'homme n'est-il pas la brebis de Dieu) galeuses se font sauter au nom de la foi (alors que la foi est le cadet des soucis des brebis et ce n'est un secret pour personne). Les brebis tuent leurs sœurs et leurs frères pour les empêcher de s'unir, pour anéantir toute tentative de concorde nationale, de cohabitation des différentes ethnies ou minorités religieuses, ou d'instauration d'un Etat stable et paisible où les voix de toutes les brebis seraient entendues et respectées et où le royaume des brebis pourrait prétendre au développement économique et social.

Les brebis galeuses se démènent au contraire pour faire avorter intrinsèquement le processus de paix avec les sourds, elles sont plus bouchées que les plus sourds ... toujours au nom de la Foi.
Sourdes et galeuses, les pauvres brebis, font-elles plus peur ou pitié?

Bon là j'arrête, je m'éloigne de Gibran, walletchi Kalila Wa Demna zeda? Ayya bonne nuit.

2008 année du ''Prophète''

En 2008, le Liban célèbre le 125e anniversaire de la naissance de Gibran Khalil Gibran (1883-2008). Pusieurs manifestations sont prévues pour commémorer la naissance du génie, au pays du cèdre et à travers le monde.

15 mars 2008

Dis, c'est quoi l'amour?

Bonjour les amis et bienvenus sur mon blog, que je tenais à inaugurer par un hommage à mon seigneur et maître:

" ... Alors Almitra dit, Parle-nous de l'Amour.
Et il leva la tête et regarda le peuple assemblé,

et le calme s'étendit sur eux.
Et d'une voix forte il dit :

Quand l'amour vous fait signe, suivez le.

Bien que ses voies soient dures et rudes.

Et quand ses ailes vous enveloppent, cédez-lui.

Bien que la lame cachée parmi ses plumes puisse vous blesser.

Et quand il vous parle, croyez en lui.

Bien que sa voix puisse briser vos rêves comme le vent du nord dévaste vos jardins.

Car de même que l'amour vous couronne, il doit vous crucifier.

De même qu'il vous fait croître, il vous élague.

De même qu'il s'élève à votre hauteur et caresse vos branches les plus délicates qui frémissent au soleil,

Ainsi il descendra jusqu'à vos racines et secouera leur emprise à la terre.

Comme des gerbes de blé, il vous rassemble en lui.

Il vous bat pour vous mettre à nu.

Il vous tamise pour vous libérer de votre écorce.

Il vous broie jusqu'à la blancheur.

Il vous pétrit jusqu'à vous rendre souple.

Et alors il vous expose à son feu sacré,

afin que vous puissiez devenir le pain sacré du festin sacré de Dieu.

Toutes ces choses, l'amour l'accomplira sur vous afin que vous puissiez
connaître les secrets de votre cœur,

et par cette connaissance devenir une parcelle du cœur de la Vie.

Mais si, dans votre appréhension, vous ne cherchez que la paix de l'amour et le plaisir de l'amour.

Alors il vaut mieux couvrir votre nudité et quitter le champ où l'amour vous moissonne,

Pour le monde sans saisons où vous rirez, mais point de tous vos rires,

et vous pleurerez, mais point de toutes vos larmes.

L'amour ne donne que de lui-même, et ne prend que de lui-même.
L'amour ne possède pas, ni ne veut être possédé.

Car l'amour suffit à l'amour.

Quand vous aimez,

vous ne devriez pas dire, "Dieu est dans mon cœur",

mais plutôt, "Je suis dans le cœur de Dieu".

Et ne pensez pas que vous pouvez infléchir le cours de
l'amour car l'amour, s'il vous en trouve digne, dirige votre cours.

L'amour n'a d'autre désir que de s'accomplir.

Mais si vous aimez et que vos besoins doivent avoir des désirs, qu'ils soient ainsi:

Fondre et couler comme le ruisseau qui chante sa mélodie à la nuit.

Connaître la douleur de trop de tendresse.

Être blessé par votre propre compréhension de l'amour;

Et en saigner volontiers et dans la joie.

Se réveiller à l'aube avec un cœur prêt à s'envoler et rendre grâce pour une nouvelle journée d'amour;

Se reposer au milieu du jour et méditer sur l'extase de l'amour;

Retourner en sa demeure au crépuscule avec gratitude;

Et alors s'endormir avec une prière pour le bien-aimé
dans votre cœur et un chant de louanges sur vos lèvres."