L'inconditionnelle que je suis des hadhras, kharjas, aissaouias et toutes sortes de spectacles de chants soufis et d'incantations du genre a été énormément déçue par la Hadhra 2010. Même si je m'attendais à une version "revisitée", je garde de cette soirée un mauvais souvenir, le remake était complètement raté, une espèce de ratatouille indigeste qui a fini par m'énerver !
On ne reconnaissait même pas les airs qu'on aime tant, et en dépit des rares jolies voix, ça ressemblait plus à un spectacle de fin d'année d'une école de bas niveau (comme l'a si bien dit mon amie Myrtille Chocolat :)
Les chants ont a été massacrés, à la limite du sacrilège ... une castafiore reprenant ce qui semblait être "ya belhassan ya chedly"; un choux ambulant, véritable calamité sans voix, au costume d'une grande laideur qui se trémoussait et s'étirait dans tous les sens sur un "sidi abdelkader" méconnaissable; des danseuses aux costumes bizarres et moches s'agitaient sur un semblant de pas classiques, chacune égarée dans son univers; un akécha pas très convainquant, étant attaché par des rubans de satin multicolores au lieu des chaines; une Cléopâtre-mariée-du-kef trônant sur sa Jahfa avec des branches de palmiers comme déco (on ne sait plus où on est, à quoi ni à qui l'identifier), et qui hurle dans son micro "bechwayyaaaaaa" en entrant sur scène parce que les malheureux qui la transportaient lui on cogné la tête ...
Le mélange des instruments et des genres n'était pas du tout réussi, la mayonnaise n'a pas pris, au contraire, elle a viré !! et comme c'était long, et que les temps morts l'étaient aussi, on s'ennuyait, on grimaçait, on était frustré, on sifflait, on huait .. et le massacre continuait !
Le son des bnéder (ou bendirs) était étouffé par le saxo, la guitare sèche cassait l'ambiance et le mariage orient-occident, en l'occurrence hadhra tunisienne-friday rock au buffy, était clairement voué à l'échec. A noter, en revanche, et pour rendre à César blablabla, la qualité des performances du saxophoniste, des violonistes, du bassiste et du guitariste qui, sorties de ce contexte, ont été très bonnes.
Mais les performances individuelles n'ont pas suffit à sauver un tout chaotique, qui a irrité la majorité du public, le reste étant du genre à soutenir "l'innovation" bon gré mal gré, aux dépens de la qualité et du kif, histoire de paraitre "branchés" et "in" même s'ils ont détesté.
Jaziri en a-t-il TROP fait ou est-ce l'absence de Samir Agrebi qui s'est drôlement fait ressentir ? Faut-il dans ce cas revoir le mérite attribué lors de la première Hadhra, qui avait eu un succès fou ?
Bref, la Hadhra 2010 est à oublier vite, très vite ... et je me suis dépêchée de passer à autre chose pour oublier l'agacement qu'elle m'avait causé.
C'est comme ça qu'en assistant, samedi, au concert de Johnny Clegg, j'ai pu voir ce qu'était un mariage réussi entre sonorités locales (africaines ici) et couleurs occidentales. Y'a pas photo comme dirait l'autre, ça c'était du spectacle!
Le concert était excellentissime en tout point: entre engagement politique, combat écologique, cause identitaire et un voyage à travers les contes et légendes d'Afrique, Clegg et ses musiciens étaient irréprochables de justesse, de vivacité, de synchronisation, le tout savamment concocté dans une ambiance cool et très décontractée, l'habituelle et si agréable nonchalance africaine conjuguée aux rythmes endiablés, le tout parsemé d'humour bien dosé.
Le public était conquis et l'a fait savoir... et mention spéciale pour la qualité du son, un kif d'enfer !!!!!!